Quel changement de point de vue !!! ou l'abandon du B2i !!!

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La publication au BO n°34 du 22 septembre 2005 de la circulaire n°2005-135 en date du 9 septembre mérite toute notre attention car elle apporte des modifications importantes à des dispositions précédentes en particulier concernant le B2i.

En premier lieu deux passage posent question :

Le premier concerne la délivrance du B2i. Il est écrit :

  • « – L’attestation est délivrée à tout élève pour lequel au moins 80% des items ont été validés, à condition qu’ils soient répartis dans chacun des domaines de compétences. »

Enoncée au nom du réalisme et de l’observation de terrain, cette phrase peut être lue de deux manières :

  1. – une adaptation du cadre du B2i aux habitudes des enseignants pour favoriser la mise en place du B2i
  2. – une reculade suivie d’une incohérence conceptuelle.

On ne peut que saluer le fait que le ministère face preuve de pragmatisme en précisant que les compétences du B2i sont peut-être trop ambitieuses et qu’il faut les limiter. Mais il est totalement incompréhensible; voire inadmissible que l’on puisse considérer « qu’être presque compétent » signifie « être compétent ». On nous précise qu’il faut une répartition (laquelle) dans chacun des domaines. En fait ce qui peut sembler du réalisme est en fait, selon moi, une forme démagogique de recul qui consiste à accepter que les enseignants habitués à la notation traditionnelle (relire la constante macabre d’Antibi, mais aussi tous les travaux de docimologie) puisse ne pas entrer dans la logique des compétences. Les spécialistes de l’évaluation des compétences ne pourront que « rire avec tristesse » devant cette position nouvelle du ministère. Quel affront envers les élèves, les familles ! quel affront envers le socle commun de connaissances et de compétences qui pourrait peut-être aussi être validé à 80% !!!! Même si, comme je le disais dans l’entretien dans le Monde de l’Education du mois de Septembre, cette évaluation pose problème, il aurait sans doute mieux valu réformer le contenu du B2i, le rendre plus compatible avec la réalité des établissements que d’accepter de renoncer à ce qui est au coeur même du projet B2i : une véritable compétence TIC.

Le deuxième passage concerne le référentiel lycée proposé suite aux expérimentations. J’avais participé à l’élaboration du premier projet dans lequel on avait fait apparaître, à ma demande entre autres, que les compétences citoyennes, juridiques et éthiques devaient être intégrées de façon transversale aux autres. Or dans ce nouveau projet on peut lire les domaines suivants :

  1. « Domaine 1 : compétences du B2i collège
  2. Domaine 2 : Utiliser un environnement numérique de travail
  3. Domaine 3 : Utiliser les TIC de façon citoyenne
  4. Domaine 4 : Acquérir, transformer, produire de l’information »

Comment utiliser un ENT et travailler de l’information dans avoir une dimension citoyenne. Comment travailler une dimension citoyenne sans un contexte. On m’accusera surement de mauvaise foi, mais je pense qu’il y a un véritable risque à formuler ainsi cette dimension citoyenne : cela devient un objet « à part », un en-soi, sans lien, alors que c’est avant tout un objet « intégré » au coeur de toutes les pratiques. Heureusement chaque établissement, chaque enseignant aura à coeur de rattrapper cela dans ses pratiques quotidiennes

Pour y voir plus clair regardons les autres éléments signifiants de ce texte :

  • « La dénomination B2i niveau 1 est remplacée par B2i école, la dénomination B2i niveau 2 est remplacée par B2i collège, la dénomination B2i niveau 3 est remplacée par B2i lycée-CFA. « 

On remarque ici que la notion de niveau disparaît. il est vrai qu’elle comporte une connotation criticable, mais le risque de la nouvelle dénomination est d’ancrer davantage le B2i et le niveau de validation, alors que l’on peut tout à fait envisager une progressivité de la maîtrise des TIC qui soit indépendante du niveau scolaire d’appartenance, mais réellement de la progression dans l’apprentissage. Il était intéressant dans l’idée initiale de concevoir le B2i et le C2i dans une continuité au cours de l’ensemble de la scolarité. Va-t-on assister à un recloisonnement des niveaux alors qu’on avait là un bon prototype dans la continuité des cycles… dont on sait qu’ils ne sont pas mis en place au collège et souvent difficilement en maternelle et au primaire.

Plus loin est écrit :

  • « De plus, pour l’année scolaire 2005-2006, les lycées (LEGT, LP) et les CFA gérés par les EPLE devront valider les compétences du B2i collège pour les élèves qui n’auraient pas acquis l’attestation B2i collège. Pendant cette période transitoire, les établissements (LEGT, LP, CFA) qui le souhaitent peuvent délivrer une attestation de B2i lycée-CFA. »

On voit là la preuve de la mise en place du troisième maillon de la chaîne B2i(1 puis 2 et enfin 3) on ne peut que constater l’intérêt de cette mise en place qui, elle ne le dit pas met fin à la mise à niveau en classe de seconde qui était en vigueur jusqu’alors ( au moins depuis le texte de 1999, non abrogé à ce jour à ma connaissance)

Les éléments suivants montrent la volonté de réalisme ministériel compte tenu des cinq années passées.

  • « Compte tenu de l’expérience des écoles, collèges, lycées et CFA ayant mis en oeuvre les B2i, les précisions suivantes sont apportées aux modalités de validation :
  • – L’attestation est délivrée à tout élève pour lequel au moins 80% des items ont été validés, à condition qu’ils soient répartis dans chacun des domaines de compétences.
  • – Au collège, au lycée et dans les CFA, au moins deux disciplines différentes doivent intervenir pour pouvoir valider l’attestation du B2i.
  • – Il est rappelé que tous les enseignants (y compris donc les documentalistes) ont vocation dans les collèges et les lycées/CFA à valider le B2i. »

Les propositions deux et trois posent question : « au moins deux disciplines est-il » compatbile avec « tous les enseignants ont vocation ». On voit tout de suite le réalisme s’aligner sur le moins disant. Nos enquêtes ont bien montré que ce sont très souvent deux voir trois enseignants qui s’occupent du B2i, voici la confortation dans le texte. l’objectif de travail en équipe est désormais abandonné !

Cette phrase est un autre levier réaliste :

  • « Il est indispensable :
  • – que les feuilles de position du B2i école soient systématiquement transmises,« 
  • Cette mesure met en évidence cette nécessité de continuité et c’est une bonne chose, même si elle se trouve quelque peu en contradiction avec la nouvelle dénomination qui pourrait préter à confusion.

C’est du coté des enseignants en formation initiale que les choses vont se renforcer :

  • « Aussi l’obtention du C2i niveau 1 sera à terme exigée de tous les étudiants entrant à l’IUFM. Celui-ci amènera les professeurs stagiaires au niveau 2 du C2i, c’est-à-dire à la capacité d’utiliser les TIC dans leur pratique pédagogique. »

On peut penser qu’il y a dans cette proposition une autre forme de réalisme : puisque les enseignants en poste ne s’y mettent pas nous préférons désormais attaquer sur un autre front celui des jeunes. il sera intéressant d’interroger les IUFM sur le sujet surtout lorsqu’ils vont s’intégrer aux universités, si cela se fait.

Ces jeunes enseignants font l’objet de toutes les attentions :

  • « Les outils de formation ouverte et à distance validés par le ministère seront intégrés dans les plans de formation des IUFM et mis en oeuvre dans la formation continue pour développer des habitudes d’auto-formation, personnaliser les contenus de form
    ation, favoriser les échanges de pratiques entre enseignants, mettre des services de conseils et d’accompagnement pédagogiques ou disciplinaires adaptés aux besoins quotidiens des enseignants. »

On peut saluer ici ce projet tant il semble cohérent avec le référentiel proposé pour le C2i professionnel métiers de l’enseignement. On peut aussi signaler l’intérêt de l’emploi du terme « autoformation » qui risque d’être au centre des questionnements pédagogiques des prochaines années. Peut-être le terme portfolio aurait-il pu être glissé ici comme je le suggère avec mes collègues depuis plusieurs années à propos du B2i et comme je l’ai rappelé dans mon intervention du 23 Septembre à Poitiers aux 7èmes rencontres Réseaux humains, réseaux technologiques organisés par le département lettres langue de cette université.

Enfin un commentaire sur le nouveau B2I lycée CFA, il faut reconnaître qu’il a été, par rapport à la première proposition de 2002, largement amputé et peut-être normalisé en fonction des élèves de tous les lycées, ce qui peut sembler justifié, mais qui posera problème pour l’articulation avec l’enseignement supérieur.

Bref un texte majeur, qui a rang de circulaire (donc le plus bas dans la hiérarchie des textes…) mais qui, comme le B2i de 2000 qui avait le même rang, à valeur désormais d’obligation…. Il sera intéressant d’observer si cela favorise la mise en place du B2i…

A débattre

Bruno Devauchelle

1 Commentaire

    • Danielle sur 21 novembre 2005 à 12:34
    • Répondre

    un constat impeccable que je n’aurais pas su formuler si bien…, "accompagnatrice à la mise en place du b2i", j’ai l’impression de marcher sur des oeufs avec ces ordres et contre ordres enrobés de souplesse … j’attends les reformulations des domaines de compétence prévues pour décembre … et qui m’imposent des réserves quant aux outils à utiliser pour la mise en oeuvre, tout en disant : allez de l’avant il est essentiel de se remettre ici aussi en question et de faire utiliser les nouveaux outils s’ils apportent un plus à l’élève.

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