Après les TBI (N ?), les boitiers de vote, arrivent les applis tablettes… interactives

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En deux jours, deux annonces de vendeurs de TBI (N ?) tentent d’ouvrir un nouveau marché pour ceux-ci. Les spécialistes le savaient depuis longtemps, mais les commerçants ont d’abord écoulés leurs stocks… les Tableaux numériques de toutes sortes s’épuiseraient vite… donc il fallait les vendre rapidement avant que les usagers ne s’aperçoivent qu’il y avait, pédagogiquement bien mieux à faire. J’ai écrit, il y a longtemps déjà sur ce blog, ce que je pensais de cette fausse interactivité vendue avec les tableaux numériques. Les premiers témoignages d’expérimentateurs avaient confirmé les pressentiments : ils avaient une tablette sans fil qui permettait de prendre en main à distance, de sa place, le Tableau numérique. Car l’effet magistral du TBI était redoutable et de plus ils étaient le plus souvent utilisés comme simple vidéoprojecteurs. Il y avait fort à parier que du fait de cet usage, les vendeurs devraient ouvrir leur offre à de nouvelles formes d’interactivité s’ils ne voulaient pas subir un retour de bâton… d’acheteurs déçus de ces usages réels, bien différents des usages vendus et parfois prescrits… cela a commencé avec les boitiers de vote qui se sont multipliés sur toutes les solutions. Et puis l’arrivée des tablettes numériques a fait frémir ces marchands qui semblaient bien loin de cette logique : passer du prof à l’élève du tableau collectif à la tablette individuelle a été probablement un renversement important… et peut-être pas facile à aborder. Enfin le I d’interactivité peut-il prendre un sens nouveau, du moins dans l’argumentaire commercial.
Y a-t-il eu tromperie ? Non il y a eu aveuglement. En particulier de bon nombre de responsables qui ont vu dans ces objets techniques pris isolément « l’objet fétiche » qui prouverait la modernité de leur enseignement… du fait de la technologie. Ce processus est très connu et facile à observer. C’est en particulier dans les effets d’annonce, lors de la mise en place initiale. Quand aux usages et à la suite donnée à la pertinence d’usage de ces équipements, bien peu nombreux sont ceux qui osent s’y impliquer ou en tout cas rendre public ce qui se passe réellement. Probablement de peur de devoir reconnaître des choix un peu hâtifs, voire sommaires, pris au nom de la seule modernité : l’image de marque du établissement, voire d’un système éducatif comme on a pu le voir au Québec assez récemment. Il est assez désolant d’observer la cécité récurrente de nombre de décideurs, éblouis qu’ils ont été par une démonstration ou un discours enflammé…
Abordons maintenant la question de l’évolution que constitue la mise en réseau de la tablette au sein d’une classe équipée d’un tableau numérique. Quelles seront les réelles fonctionnalités, quelles seront les possibilités à venir, peut-on rêver ? On peut simplement imaginer que ce qui est affiché sur grand écran ne soit rien d’autre qu’un tableau blanc partagé (on connait cela depuis longtemps dans les applications de visio à distance) et qui donc est aussi présent sur les écrans des ordinateurs ou des tablettes des élèves. Chacun peut alors, s’il y est invité, participer à ce qui se construit devant tout le monde. On peut aussi imaginer qu’un système permette aux élèves de proposer une question écrite ou orale ou un document que l’enseignant peut ensuite intégrer. On trouve en quelque sorte cette possibilité dans adobe connect par exemple. On peut aussi imaginer qu’un produit de travail de groupe (style google docs ou autres) permette d’afficher, sous le direction de l’enseignant ou d’un animateur, un document en train d’être élaboré par le collectif… Evidemment, on peut aussi imaginer, mais là c’est plus compliqué techniquement que des élèves à distance puissent aussi suivre sur leur tablette ou leur ordinateur de chez eux ou d’un autre lieu et participer à la classe, comme n’importe quel élève présent. Un environnement logiciel complexe associant travail de groupe (et donc réseau social) et affichage partagé pourrait servir de base à un tel produit qui rendrait enfin l’ensemble d’une activité interactive avec le numérique. Mais alors il semble que le TBI, tel que nous l’avons connu est dépassé et qu’il suffirait d’un vidéo projecteur et d’une application ad hoc, disponible sur chaque machine. On peut aussi imaginer des logiciels d’évaluation collaboratifs et autres outils complémentaires d’enseignement assisté par ordinateur qui compléteraient l’offre.
Que penser de tout cela. Qu’une étape intermédiaire a été créée de manière abusive et qu’elle n’a pas servi à grand chose : l’étape tableau blanc numérique. En effet en terme d’impact pédagogique, le plus important était, pour certains enseignements une facilitation de la tache de l’enseignant qui joue avec son tableau comme s’il était devant son ordinateur ou sa tablette, sans changer sa place dans la classe (debout face aux élèves, selon le modèle canonique). L’autre impact, souvent évoqué a été la motivation des élèves, l’attention améliorée etc… Ces arguments ne trompent pas, ils sont le reflet de ce que l’on appelle souvent l’effet nouveauté. Chaque acteur, curieux de découvrir un nouvel objet qui l’attire va s’investir davantage s’il arrive à passer un premier seuil de maîtrise. Dès lors il va amplifier progressivement son investissement surtout s’il obtient en retour une image positive de son activité, de la part de ceux avec laquelle il la pratique (les élèves) et de la part de sa hiérarchie qui va l’encourager dans son dynamisme. Il arrive, certains collègues en ont récupéré les fruits, que l’institution repère ces personnes pour les extraire de leur milieu et en faire des ambassadeurs. On découvre alors qu’il ne suffit pas d’avoir développé soi même une pratique innovante pour qu’elle soit diffusable et transférable ensuite à la majorité. On ne peut pas dire « moi je l’ai fait dans ma classe tout le monde peut aussi le faire », quand ce n’est pas « tout le monde devrait le faire »…
La classe interactive a existé bien avant les TIC, TUIC, TICE, numérique et autre. On a parfois appelé ça parfois cours dialogué, mais aussi classe coopérative, travail de groupe, travail par projet etc…. L’arrivée de moyens techniques nouveaux dans la classe ne suffit pas à rendre la classe interactive, mais elle peut y contribuer, à condition que l’enseignant sache mener une activité d’enseignement/apprentissage dans cette logique pédagogique. Evidement cela ne va pas de soi immédiatement. Même si le cours magistral tend à disparaître des salles de classe du collège et du lycée et aussi au primaire, on sait bien qu’il y a des moments où le frontal et le magistral peuvent avoir une utilité. Comme de surcroit il est l’assurance de la conduite de la classe, de la maitrise des rythmes, on peut facilement se laisser aller à le généraliser et réduire l’interaction au cours dialogué à base de questions devinettes ou jeu des 1000 euros… L’arrivée de nouvelles possibilités techniques est probablement intéressante, mais de là à en faire la solution miracle à l’apprentissage…. Malheureusement on a déjà vu et entendu cet argument…
Les sites de ces nouveautés…
http://www.smarttech.com/notebookapp
Annoncé là : http://www.ludovia.com/technologies_educatives/2012/1628/innovation-tablettes-lancement-de-l-application-workspace.html
A suivre sur le site : http://www.einstruction.com/
A suivre et à débattre
BD

8 Commentaires

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    • Marie-Odile Morandi sur 16 septembre 2012 à 07:15
    • Répondre

    Bonjour,
    Encore une fois merci pour ces observations si pertinentes.
    Notre société de consommation a parfaitement formé ses commerçants qui n’ont plus aucune difficulté à « éblouir les décideurs » et atteignent leur but très facilement.
    L’utilisation de n’importe quel matériel en classe avec les élèves a toujours impliqué un gros investissement de la part de l’enseignant, de l’instrument le plus banal à l’objet technique le plus « sophistiqué ». L’utilisation d’un tbi implique beaucoup de contraintes, humaines et d’organisation, et chaque situation, chaque cas est particulier. Souvent dans nos établissements les situations qui permettraient l’utilisation de ce « gadget »* ne sont pas encore mises en place et voilà que c’est déjà démodé !
    Attendons la suite, « les nouvelles possibilités » de la technique. Il serait bien avant de définir ce que signifie « interaction » entre enseignant et enseigné.**
    *J. Ellul – Le bluff technologique – L’univers du gadget
    ** Jacqueline de Romilly – «  Mes chers élèves vous ne m’avez jamais rien appris »

  1. On a trop vite associé, l’interactivité fonctionnelle proposée par ces tableaux avec l’interactivité relationnelle qui existe dans une classe lorsque l’on met en oeuvre certaines pratiques pédagogiques.
    La première est permise par l’objet technique qu’est le tableau associée à l’utilisation d’un logiciel. Lorsque l’on montre un diaporama, sur un tableau numérique. Il n’y a pas vraiment d’interactivité. Un video projecteur est alors bien suffisant. L’activité est tout autre lorsqu’on met en oeuvre une mappemonde virtuelle ou une figure géométrique « déformable ». L’intérêt du tableau par rapport à l’utilisation d’une souris réside dans le lien que l’on peut voir avec le geste de la main et l’image qui se recompose sous les yeux de tous. C’est la mise en scène de la présentation magistrale qui est plus attrayante. La possibilité d’agir sur le visuel en accord avec le discours permet également pour un certain nombre de personne, une meilleure compréhension. On oublie trop souvent que la plus value avec ces outils vient des logiciels que l’on choisi et de l’utilisation que l’on en fait en classe.
    La seconde, l’interactivité relationnelle, est permise par la mise en oeuvre consciente ou inconsciente d’un scénario pédagogique adapté. A la marge, le tableau numérique, lorsqu’on utilise des outils pertinents, permet d’enrichir ce type d’interaction.
    La tromperie, à mon sens, réside dans le fait de faire croire que l’interaction « s’installe » par la simple présence du tableau numérique dans la classe. En fait, il faut un travail de préparation spécifique qui vient en plus de la préparation habituelle du cours. Les outils pertinents, faciles à utiliser avec le tableau, et qui apportent de réelles plus values ne sont pas légion.
    Ronan Goas

  2. Entièrement ok avec cet article, on m’a imposé un tbi dans ma classe, quelle horreur, et pourtant c’est un modèle très haut de gamme, je regrette mon vidéoprojecteur ou je projetais sur mon tableau blanc. Au mois je pouvais avec un feutre annoté un site web, maintenant c’est terminé, obligé de convertir mes fichiers en pdf pour justement pouvoir annoté. Quand j’ai posé la question à l’installateur si je pouvais connecter mon ipad, non c’est compliqué ou plutôt impossible.

  3. Bonjour,
    votre réflexion sur les usages pédagogiques des tablettes (et autres technologies pervasives!) m’amène à vous indiquer ce que nous avons mis en place depuis près de 2 ans chez nos clients pour leurs employés : écran vidéo-projeté (on a pas encore fait avec des TBI et on ne le pense pas utile), tablettes (jusqu’à 60 en réseau!) et smartphones tous connectés au sein d’une même salle de formation pour créer un même univers partagé et ludique (cf. http://www.serious-game-sessions.com/ pour mieux comprendre ce dont il s’agit).
    Le bénéfice reconnu par les formateurs et apprenants est systématiquement le même : une expérience d’apprentissage originale où les apprenants se sentent motivés pour mobiliser leurs connaissances et faire avancer leur équipe. Je le concède volontiers : nos apprenants sont adultes et peut-être n’en serait-il pas de même pour de plus jeunes apprenants! En tout cas, si ce type de dispositif peut fonctionner, je rejoins volontiers la remarque de Ronan Goas en disant que ce n’est certainement pas du seul fait d’utiliser une technologie dernier cri (nous avons aussi fait sans tablettes et ça marchait très bien). Les technologies nous apportent néanmoins une « mémoire » supplémentaire de l’activité pédagogique et qui, si elle est utilisée à bon escient peut s’avérer très intéressante pédagogiquement.
    Luca Bisognin.

    • Claude sur 19 septembre 2012 à 09:04
    • Répondre

    Pourquoi ne pas garder que l’essentiel de ces technologies :
    – le TBI comme un tableau multiple. (on devrait simplement dire TN – tableau numérique)
    Quel enseignant n’a pas régulièrement besoin d’un tableau plus grand ?
    http://physchim.info/formdist/tbi.php
    – la tablette comme un terminal Internet facile à transporter et à déployer.
    Combien d’enseignants ne vont pas en salle informatique car il faut la réserver, déplacer les élèves, attendre que les ordinateurs s’allument, supporter le bruit des ventilateurs et la chaleur dégagée en été.
    10 tablettes et une borne WiFi tiennent dans un sac pour un poids d’environ 6kg. L’équipement peut se faire à moins de 3000€ (et pas besoin de passer par un fournisseur de matériel pédagogique). Mais attention, j’ai testé des tablettes low-cost (une 7″ à 100€ et une 9″ à 170€). Le « tactile des écrans » n’est pas assez réactif et empêche tout usage intensif en particulier lorsqu’il s’agit de taper du texte. Le format 7 pouces est vraiment trop petit.
    Le reste n’est que effets de nouveautés. Mais il faut bien les tester pour se rendre compte de leurs pertinences pédagogiques à long terme.

    1. Merci de votre témoignage.
      Une remarque, votre dernière phrase est un oxymore : tester et long terme ne sont pas compatibles à mon avis… car une fois que l’habitude s’installe, les paramètres d’observation changent par rapport à la phase de test
      BD

  4. Bonjour,
    Utilisateur depuis 2005-2006 d’un TNI e-beam, j’en ai vu les limites relativement vite.
    En effet, habitué du travail en groupes, de recherches individuelles, le TNI ne sert que très peu aux élèves si ce n’est que lorsque le travail est prévu pour un groupe. Aussi, il y 3 ans, j’ai opté de manière beaucoup plus efficace pour un clavier et une souris sans fil qui circulent dans la classe lors des travaux de grand groupe… cela permet à tous les élèves de montrer leurs travaux… pour 30€.
    Par ailleurs, l’informatique, l’ordinateur, la tablette ne sont que des outils au même titre que le cahier ou le livre. Il faut donc penser l’activité des élèves de manière différente si on veut intégrer ces outils à la classe. A mon sens, c’est bien l’ENT qui permettra cette adaptation. Beneyluschool, en phase de mutation, est une interface très porteuse, googledoc et google drive demandent à être testés…
    Lionel

  5. Les boitiers de vote électronique et les logiciels de vote complètent parfaitement la série d’outil de l’enseignant. Le site de Pericles met en avant les points positifs de l’utilisation du boitier de vote interactif pour l’enseignant et le participant.
    http://i-pericles.com/concept-vote-interactif/

  1. […] Après les TBI (N ?), les boitiers de vote, arrivent les applis tablettes… interactives En deux jours, deux annonces de vendeurs de TBI (N ?) tentent d’ouvrir un nouveau marché pour ceux-ci. Les spécialistes le savaient depuis longtemps, mais les commerçants ont d’abord écoulés leurs stocks… les Tableaux numériques de toutes sortes s’épuiseraient vite… donc il fallait les vendre rapidement avant que les usagers ne s’aperçoivent qu’il y avait, pédagogiquement bien mieux à faire. L'École numérique » Boîte à OuTices : les TBI -Mozilla Firefox Ressources […]

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