L’auteur de ces lignes n’est pas considéré comme un « vrai chercheur » par une partie des « enseignants chercheurs » qui œuvrent dans les domaines (éducation, TICE et sciences humaines) sur lesquels il s’exprime. Depuis que je fréquente de près cet univers (et c’est récent) je suis assez ébahi des jugements, rivalités voir des jalousies qui peuplent ce « petit monde » (David Lodge). La fréquentation personnelle de nombre de ces personnes m’a souvent révélé de la passion, du partage, de l’enthousiasme et peu de dogmatisme. Du coup il semble bien qu’il y ait deux types de chercheurs : les joyeux et les grincheux…
Deux documents peuvent compléter notre lecture des faits :
– l’enquête nationale « Enquête nationale sur les forces de recherche impliquées dans le champ de l’apprentissage et de l’éducation » (décembre 2016 https://cache.media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/Rapports/38/9/rapport_enquete-dgesip_VD_747389.pdf)
– Le rapport au ministre T Mandon effectué par Athena et Allistène « La recherche sur l’éducation Eléments pour une stratégie globale » (Avril 2017 http://www.allianceathena.fr/sites/default/files/Volume%201%2016%20avril.pdf)
Bien d’autres lectures, bien sûr peuvent alimenter ma réflexion et en particulier celles sur les méthodologies de recherche dont je ne citerai que deux auteurs, parmi d’autres, qui m’ont marqué : Howard s Becker et Jean Marie Van der Maren. C’est par leur ouverture méthodologique (j’ai été influencé par l’école doctorale de Paris 8 entre 1994 et 2000) que j’ai surtout compris qu’être un vrai chercheur ce n’était pas rentrer dans un moule que certains sont prompts à tenter d’imposer à la communauté scientifique.
Pour tenter d’aller plus loin dans ce questionnement, suis-je ou non un chercheur, j’ai essayé de réfléchir aux critères que l’on peut fixer pour y répondre. Il y a bien sûr les critères académiques, il y a aussi les critères scientifiques, et enfin il y a les critères empiriques. Par ces derniers critères j’entends évoquer les pratiques de terrain et leur mise en réflexion dans des cadres plus ou moins « rigoureux » et surtout leur diffusion. Mais le problème de fond est récurrent : chaque chercheur se fait une idée de la recherche et c’est parce qu’il n’y a pas qu’une seule forme de recherche qu’il y a autant d’écart.
Un exemple de critique de la recherche concerne « la recherche action ». Très décriée par certains, magnifiée par d’autres, cette approche de la recherche n’est pas sans poser de questions si l’on se réfère par exemple à des écrits comme ceux de Claude Bernard ou plus récemment d’Elena Pasquinelli. Mais ce que j’observe et lis me pose problème : il me semble qu’il y a chez nombre de chercheurs une vision académique et normée de la recherche qui provoque des effets gênants pour ceux et celles qui ont du mal à respecter ces normes. Quand un Enseignant Chercheur s’étonnait que l’on ne prenne pas en comptes ses livres comme traces de ses recherches il témoigne de ces normes académiques qui préfèrent les revues à comité de lecture dont on sait pourtant qu’elles ne sont pas invulnérables et donc pas imperméables à diverses manipulations (dans tous les champs de recherche d’ailleurs).
Le développement du web a introduit un nouveau contexte qui enlève des barrières traditionnelles. Entre le consultant, l’expert et le chercheur, difficile de s’y retrouver sur Internet. D’ailleurs certains profitent de la liberté offerte par la publication désintermédiée pour augmenter la confusion. Mais en même temps la séparation des clans est aussi dangereuse. On revient alors à notre question initiale du « vrai chercheur ». De plus en plus il est nécessaire de prouver qu’on est chercheur comme doit le faire celui qui présente sa thèse (dont on rappelle qu’elle est un passage formel qui introduit au droit à la recherche). Les gardiens de l’orthodoxie académique ont bien du mal avec ces nouveaux espaces. Le choix du repli académique est évidemment dans l’air du temps (repli identitaire).
Finalement la question est celle de la crédibilité des propos. Qui parle ? D’où parle-t-il ? Sur quoi appuie-t-il son propos ? Nous découvrons que ces séparations instituées jadis sont en train de perdre leur valeur dès lors qu’on y regarde de plus près. Il suffit de lire nombre de textes de personnes se présentant comme scientifiques et chercheurs pour comprendre que l’académisme formel n’est jamais une garantie. Malheureusement, a contrario, l’étiquette reste, au-delà du travail effectif du chercheur et de la pertinence de son travail, un label qui lui confère une autorité de la parole. Et c’est bien ce qui pose problème.
C’est pourquoi je propose d’analyser la pertinence des propos dans la durée et la continuité des écrits sur plusieurs années. Ainsi on pourra se rendre compte qu’au-delà des coups scientifiques faits par certains, il y a dans le développement des personnes, tout au long de leur trajectoire, des éléments suffisamment nombreux pour accepter de reconnaître à quelqu’un la valeur de son travail de recherche et non pas uniquement le label de « chercheur »….
A suivre et à débattre
BD
Avr 21 2017