Faire de la veille ou savoir chercher

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Curieux dilemme que celui-ci : veiller ou savoir ce que l’on cherche, deux postures différentes ou une seule qui met en tension deux postures ? Au moment ou continuent de se multiplier les sources d’information variées et aussi utiles qu’inutiles, la question de la veille informationnelle est une véritable préoccupation qui devrait concerner les acteurs du système éducatif. Dans ce texte Eric Mainville déclare arrêter sa veille large pour passer à une veille restreinte.
Il me semble que dans le milieu enseignant un certain nombre de collègues ont adopté cette attitude depuis longtemps. Parmi les arguments avancés pour restreindre leur champ de veille l’un deux semble puissant : éviter d’être troublé par les bruits de l’environnement pour aller à l’essentiel. Parmi les arguments parfois inavoués, l’un deux semble aussi puissant : pour enseigner les manuels et les programmes me suffisent amplement. Force est de reconnaître que la difficulté de la veille pour les enseignants est fortement lié à la nature même de leur métier, d’ailleurs comme le montre ce schéma proposé par François Müller à propos des compétences des enseignants (texte officiel de 2007)  on note que la notion de veille n’est pas mise en avant en tant que telle mais qu’elle est enfouie derrière d’autres formulation qui laissent à penser que la notion de veille est bien lointaine de celle d’enseignement, comme si la veille était effectuée par d’autres…
En proposant prochainement une formation , sur ce thème l’INRP se jette à l’eau. Bonne idée qui semble avoir un écho relayé ici ou là. Mas ce qui est amusant ici, comme un peu partout à propos de la veille, c’est que l’on pose la question de savoir ce que l’on cherche. Or la formation à la méthodologie de la recherche, scientifique ou d’information, met toujours ce point en avant : clarifiez la question avant de faire votre recherche. Et là, on nous propose une veille pour « s’orienter dans la recherche en éducation, dans l’espace francophone et européen ». Comme chacun le sait, et peut en faire l’expérience, une carte géographique ne donne aucune indication à celui qui n’a pas envie de chercher quelque chose. On a l’impression, à l’époque ou le GPS remplace le sens de l’orientation, que la veille va remplacer le sens de la recherche comme si la carte allait révéler ce que l’on recherche. On pourrait filer la métaphore de la carte tant l’histoire culturelle nous en donne des exemples….
En mettant en tension veille et recherche, il me semble que l’on a là l’équilibre qu’il faut chercher à développer dans l’esprit de tous, et de nos élèves en premier. Dans un mouvement dialectique, il me paraît essentiel de penser l’articulation entre ces deux pratiques qui doivent s’alimenter l’une l’autre au risque de voir la conscience et la connaissance s’appauvrir. La recherche invite le sujet à investiguer un domaine dont les balises sont posées à priori. La veille provoque le sujet à être en alerte sur un domaine et, s’il en est d’accord, à utiliser la faculté de sérendipité pour aller plus loin dans ses recherches. Autrement dit veille et recherche s’alimentent constamment l’un et l’autre.
Dans le monde scolaire (voir universitaire) ces deux compétences sont plutôt contraires à ce qui est demandé à ceux qui apprennent, même si les discours le nient, parfois. En effet le monde scolaire, de par les programmes qui l’encadrent n’incitent ni à la recherche, ni à la veille. Même si la démarche d’investigation, la démarche de problématisation émergent peu à peu de plusieurs recommandations dans les didactiques des disciplines, cela reste très encadré, sauf si les enseignants ont eux-même effectué le passage vers ce « nouveau monde ». Or, les TIC sont à la base du potentiel de ce nouveau monde. Parce qu’elles donnent accès à tous quelque soit leurs origines (en cela il est égalitaire), les TIC invitent naturellement à ce mouvement de veille et de recherche. C’est donc probablement dans ce gisement de potentiel qu’il faut aller chercher le renouveau pédagogique, dont Guy Menant ne semble pas vraiment convaincu (cf message précédent de ce blog).
La question que pose le descriptif de ce stage proposé par l’INRP c’est qu’il présuppose cette tension sans jamais la nommer. Or c’est ce mouvement dialectique qui est essentiel pour la formation de la pensée, de l’esprit critique, pour l’acquisition et l’appropriation des savoirs, et donc la construction des connaissances. La veille et la recherche ont en commun qu’elles imposent le devoir d’étonnement. L’école a bien du mal à accepter ce devoir car il met en cause l’ordre établi, déjà bien bousculé par d’autres éléments. Et pourtant, il me semble probable que si le monde scolaire accepte d’entrer dans cet univers de la veille et de la recherche, alors il pourra envisager un enseignement dont la première vertue sera d’autoriser ceux qui apprennent à apprendre sans elle….
A suivre et à débattre
BD

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